Il s’agit d’un choix de l’ami COVIX !
Au vieux Roscoff
Trou de flibustiers, vieux nid
À corsaires ! – dans la tourmente,
Dors ton bon somme de granit
Sur tes caves que le flot hante…
Ronfle à la mer, ronfle à la brise ;
Ta corne dans la brume grise,
Ton pied marin dans les brisans…
– Dors : tu peux fermer ton œil borgne
Ouvert sur le large, et qui lorgne
Les Anglais, depuis trois cents ans.
– Dors, vieille coque bien ancrée ;
Les margats et les cormorans
Tes grands poètes d’ouragans
Viendront chanter à la marée…
– Dors, vieille fille-à-matelots ;
Plus ne te soûleront ces flots
Qui te faisaient une ceinture
Dorée, aux nuits rouges de vin,
De sang, de feu ! – Dors… Sur ton sein
L’or ne fondra plus en friture.
– Où sont les noms de tes amants…
– La mer et la gloire étaient folles ! –
Noms de lascars ! noms de géants !
Crachés des gueules d’espingoles…
Où battaient-ils, ces pavillons,
Écharpant ton ciel en haillons !…
– Dors au ciel de plomb sur tes dunes…
Dors : plus ne viendront ricocher
Les boulets morts, sur ton clocher
Criblé – comme un prunier – de prunes…
– Dors : sous les noires cheminées,
Écoute rêver tes enfants,
Mousses de quatre-vingt-dix ans,
Épaves des belles années…
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Il dort ton bon canon de fer,
À plat-ventre aussi dans sa souille,
Grêlé par les lunes d’hyver…
Il dort son lourd sommeil de rouille.
– Va : ronfle au vent, vieux ronfleur,
Tiens toujours ta gueule enragée
Braquée à l’Anglais !… et chargée
De maigre jonc-marin en fleur
Tristan Corbière (1845 – 1875) – Roscoff. – Décembre 1873 dans le recueil « Amours jaunes »
Édouard-Joachim Corbière, dit Tristan Corbière, né le 18 juillet 1845 au manoir de Coat-Congar à Morlaix (Finistère) et mort le 1er mars 1875 à Morlaix, est un poète français.
Né de l’union d’Édouard Corbière et d’Angélique Aspasie Puyo que 33 ans séparent : à sa naissance, son père est âgé de 52 ans, et sa mère de 19.
Après une enfance passée sans histoire dans le manoir du Launay, Tristan est envoyé à l’âge de 14 ans en pension au lycée impérial de Saint-Brieuc. C’est à cette époque qu’il commence à souffrir du rhumatisme articulaire qui lui gâchera l’existence et qui aura raison de lui. Son état de santé s’aggravant, il doit quitter Saint-Brieuc l’année suivante pour rejoindre son oncle médecin établi à Nantes. Il entre au lycée de Nantes en qualité d’externe. Deux ans plus tard, son état de santé l’oblige à cesser ses études. Commence alors une vie de marginal ; il voyage dans le sud de la France, où il lit les œuvres d’Hugo, de Baudelaire, de Musset.
Il s’installe ensuite à Roscoff, en Bretagne, dans une maison que possèdent ses parents. Les habitants du village le surnomment l’« Ankou », c’est-à-dire le spectre de la mort, en raison de sa maigreur et de son allure disloquée. Il aime prendre la mer sur son bateau, « Le Négrier » (titre du plus célèbre roman de son père) et se livre à quelques excentricités. Il s’amuse un jour à se déguiser en forçat, en femme ou en mendiant, l’autre à se raser les sourcils ou bien encore, alors qu’il est en visite à Rome, à traîner un porc en laisse déguisé en évêque lors du carnaval auquel assiste le pape. C’est ainsi que s’écoulent ses jours, jusqu’à sa rencontre avec une petite actrice parisienne que Corbière se plaît à appeler Marcelle, de son vrai nom Armida Josefina Cuchiani ; elle devient sa muse.
Délaissant son prénom d’état-civil, Édouard-Joachim, pour prendre celui, plus évocateur, de Tristan (pour TRISTE EN CORPS BIÈRE), il fait paraître à compte d’auteur en 1873 son unique recueil de poèmes, « Les Amours jaunes », qui passe inaperçu. Corbière, qui ne connut aucun succès de son vivant, sera révélé de manière posthume par Verlaine, qui lui consacre un chapitre de son essai « Les Poètes maudits » (1883). Le recueil se trouve également en bonne place dans la bibliothèque élitiste de Des Esseintes, le héros d’ »À Rebours » : cette présence dans l’œuvre de Huysmans contribuera à faire connaître le poète au public.
Corbière meurt à Morlaix le 1er mars 1875. Il n’a pas trente ans et n’a connu qu’une vie de solitude, brève et misérable, constamment atteint dans sa chair par la maladie, malheureux en amour, englué dans une passion unique et sordide ; sans doute, au figuré, la mer fut-elle sa véritable épouse. Le temps a rendu le poète à la lumière, et reconnu, bien tard, son talent.
Le nom des « Amours jaunes », son unique recueil, a été donné à la bibliothèque publique ancienne de Morlaix.
Source wikipédia
Un très bon choix, Zaza et merci pour ces explications à la suite du texte !
Bises♥
Bien choisi le texte sur Roscoff !!
Un beau poème évoquant la mer.
Un livre à relire que celui de Huysmans… un monument littéraire sur la décadence où on croise de grands auteurs
très beau ce poème que je ne connaissais pas merci Zaza
Un bon choix pour ce poème hors du commun ! bon mardi bisous !
Bonjour,
Oh! oui, c’est un régal, tu as raison et ce paratge est engageant à mieux connaître son oeuvre, hélas, une vie brève et souffrante, un calvaire, l’homme, malgré tout, ne manquait pas d’humour avec ce nom d’auteur.
Boonne journée
Bises
Ah, ces vieux canons braqués sur les pirates godons ! J’ai aussi appris plein de choses sur Tristan Corbière, merci ! Chris
Bonjour Zaza !
Très bon choix !
J’aime beaucoup le style de Tristan Corbière ! Merci !
Bonne journée !
Pierre
https://rotpier27.wordpress.com/
Une belle découverte ! merci pour le commentaire enrichissant et qui donne envie d’aller plus loin…
je ne savais pas pour Tristan : un poète qui me fut chère et qu’il est bon de retrouver
Passionnant écrit!
Un immense artiste…
Et sa biographie que tu publies est passionnante, avec la référence à « L’Ankou ».
Gros bisous ma Zaza et belles pensées d’amitié
Cendrine
Merci Zaza pour cette mise en lumière de ce poète dont j’avais déjà lu quelques poèmes mais pas celui ci .
merci pour les compléments d’info-
c’est bien trouvé – un bon thème de notre ami Covix-
bon aprem ! bises-
Superbe poème et triste vie quand même…Gros bisous, ma belle.
Coucou Zaza n très bien les explications à la suite du texte. MTH
Très beau poème pour cette région qui est aimée et surtout merci pour toutes les explications. Bravo. Bisous
je connais peu ce poète, merci pour tout ce que tu nous apprends sur lui