Cela se gâte !
Quatorze heures ! Il faut qu’il aille acheter à manger. Tout en réfléchissant, il s’attaque à une série d’interrogations intérieures :
– «Meg est plutôt du genre souris qui grignote menu. Moins y en a, plus c’est verdoyant et plus elle doit être contente. «Mésigue», je suis plutôt un adepte du pavé de bœuf, bien rouge, blotti sur son matelas de frites. Je ne sais pas trop quoi lui cuisiner à cette musaraigne ! J’hésite ! Du reste, moi et la tambouille, cela fait deux. A moins que j’achète des chinoiseries : rouleaux de printemps, crevettes piquantes, pâtés impériaux, bœuf aux trente-six parfums et riz cantonais. Oui, c’est pas mal ça. Meg mangera délicatement les feuilles de menthe, en buvant du thé au jasmin et moi je croquerai le reste accompagné d’un p’tit Côte du Rhône. En plus, je n’aurai pas à jouer du piano. Au coin de la rue, il y a un asiatique qui vend des plats tout faits. Juste un coup de micro-ondes, c’est tout bénef. Allez ! Go ! C’est vendu.»
Il enfile son blouson, prends le sac poubelle qui frise l’indigestion, claque la porte et plonge dans l’escalier.
Les six étages de l’immeuble, desservent chacun deux appartements. Au quatrième gauche, gîte d’un aimable et éminent juriste : Monsieur Gaëtan Tassart. La cinquantaine avérée, le visage intéressant, il est d’un abord affable. Gaëtan est président du fan-club de Mademoiselle Jacqueline François.
A droite Gertrude Grenet, une cavaleuse de première, qui a bien connu les parents de Jacqueline. Alors, bien sûr, ça les rapproche ! Quels liens unissent Gertrude et Gaëtan ? Toujours est-il, que régulièrement … un inconnu jaloux, un amoureux éconduit, que Jacky surnomme le cocu poète, exprime au marqueur, sa souffrance sur le mur du palier.
Le sens profond du texte est toujours le même. L’écriture est belle, ronde, généreuse. Il s’arrête un instant pour jouir pleinement de ce juvénile poème, qui contient déjà tous les fermants de la maturité. Lisons :
« Gaëtan gros dégueulasse
Tu pourris l’fion d’Gertrude
Que par la vulve de c’te poufiasse
Ta queue tombe en décrépitude
Et que, comme des fruits blets
Tes roustons de viellasse
Un jour, lors d’un gros pet
Tombent sur tes godasses
Que par une… »
L’œuvrette est incomplète, sans doute l’artiste a-t-il été dérangé par un quidam empruntant l’escalier. Mais quelle force, quel talent, et que la rime est riche !
Il quitte le quatrième espérant trouver la suite au-dessous, que nenni, il reste sur sa faim. Rien ! Pas le moindre petit fabliau. Les murs sont vierges, les portes sont closes.
A gauche, la tanière d’un jeune vétérinaire. Sa lionne a la griffe cruelle; surtout quand son phénix, la crinière en bataille, ausculte d’un peu trop près une jolie gazelle.
A droite, deux jeunes étourneaux débutent la construction de leur nid d’amour, à grand renfort d’outils percutants. Depuis un an ils tapent sur les murs, les passereaux, à se demander, s’ils n’ont pas fabriqué une machine à fracas…
Il poursuit sa descente. Au deuxième gauche habitent Monsieur et Madame Paul Ferrando. Ils sont d’origine latine. Monsieur Paul, homme dévoué au demeurant, est retraité et s’occupe de la copropriété. Madame Paul est …- non -, n’est pas encore morte !
A droite vit Gabriel Steinmetz, sympathique germaniste, qui éduque des mioches dans une institution confessionnelle. En deux mots: Prof dans une école de cathos. Le genre de bahut où la charité chrétienne exploite les enseignants et trompe les enfants. C’est triste, mais les parents sont consentants et l’état laïc subventionne !
Au premier, à droite, Monsieur Laidron, un ancien roulant, nouveau croulant, veuf et fumeur de mégots. Il fait partie des individus, qui n’allument jamais une cigarette, mais qui trimbalent un éternel cylindre de cendre, soudé à la lippe. Toujours prêt pour un bout de conversation ce Monsieur Laidron ! Une conversation météorologique, avec plaintes sur le passé et angoisses sur l’avenir.
L’autre logement est occupé par le fameux Monsieur Lavigne … Coiffeur occasionnel à la libération … !
Arrivé au rez-de-chaussée, il s’esquive au plus vite possible, en apnée, devant la loge de Madame Poirot, la concierge. C’est une brave femme, mais elle a inventé ni l’eau chaude, ni le fil à couper le beurre !
Il vire à gauche, vers la cour, pour déposer son sac poubelle. Il ouvre la porte et s’arrête net.
Meg est là ! A part un pigeon, borgne et boiteux, qui la dévisage de son unique œil rond, elle est seule ! Meg est étendue dans la fiente, au pied d’une grosse poubelle verte. Elle est pâle, très pâle. Ses lèvres sont sans sourire, blanches, entrouvertes. Sa tête repose dans une flaque de sang. Dans un brassage d’air le pigeon s’envole. Il regarde Meg fixement. Il sent ses jambes qui flageolent.
– «Non ! Ce n’est pas le moment», se dit-il !
Sa vue se brouille. Il s’adosse au mur, respire un grand coup, incline sa tête vers l’arrière. Les bâtiments pisseux limitant la cour, montent jusqu’au ciel. Les fenêtres vides, comme des orbites aveugles, le regardent sans le voir. Il ferme les yeux, pour mettre fin au vertige qui le pénètre, mais le bleu du ciel est toujours là, intense. Le soleil s’enfonce dans son crâne, lui arrachant un cri de douleur.
Une voix intérieure, inconnue, familière, murmure et hurle, lui ordonne !
– «Ressaisis-toi Jacky, ne reste pas planté là comme un navet. Approche-toi d’elle, va chercher du secours, fais quelque chose», pense-t-il très fort.
Il rouvre les yeux ! Il est toujours seul avec Meg. Il s’agenouille près d’elle, pose son oreille sur sa poitrine. C’est doux, c’est agréable, c’est tiède, ça respire. Elle est blessée à la tête ! Il touche doucement sa joue, rien … Il secoue légèrement son bras, un gémissement, une paupière se soulève et Meg revient peu à peu à elle.
– «Ne bouge pas, je vais chercher quelqu’un.»
Elle le retient par la manche, avec une énergie étonnante.
– «Non Eddy, aide-moi à monter chez moi.»
– «Aide moi, aide moi, elle en a de bonnes la blessée. Six étages sans ascenseur. Merci à la copropriété qui a toujours refusé d’en installer un !»
Il monte doucement, en portant Meg dans mes bras. Sa tête dodeline sur mon épaule. Un filet de sang coule le long de sa manche. Au fur et à mesure qu’il gravisse les marches. Il a hâte d’être arrivé, et pourtant, il voudrait la garder toute sa vie dans ses bras.
Au cinquième, il souffle comme un phoque. Ses poumons se gavent d’un air brûlant pauvre en oxygène. Ils n’arrivent plus à nourrir ses muscles. Des crampes le tétanisent. Il fait une pause.
Ayant retrouvé un peu d’air, il reprend son ascension. Au sixième, ça ne va pas fort, ni pour Meg, ni pour lui. Il croit bien qu’elle est repartie chez le vendeur de rêves. Dommage que Marysa soit absente, elle l’aurait aidé à trimbaler sa belle endormie.
Marysa est une bibeloteuse amie, une fière espagnole qui occupe une bonbonnière située juste au-dessus de chez lui. Elle ne s’est jamais vraiment habituée à la France ! Non, elle ne s’est jamais habituée aux imbéciles qui critiquent son accent. Alors, dès qu’elle le peut, elle retourne en Espagne. Elle l’a souvent invité à faire un bout de chemin dans sa province natale, les Asturies. Mais il n’a jamais pris le temps d’y aller dans son paradis.
Bizarre ! La porte de Meg est entrouverte ? Dans un sens, ça lui facilite la tâche. Il pousse l’huis avec les genoux de sa belle « envapée », (faut bien qu’elle serve à quelque chose !).
Il franchit l’entrée, pénètre dans le séjour-bureau-chambre à coucher et dépose doucement Meg sur le canapé.
La sensation d’un regard sur sa nuque lui impose un volte- face.
A suivre …
Ouh la mais qu’est-il arrivé à Meg… bon sang ! A suivre, bises
Tu nous laisses en plein mystère et ce n’est pas très rassurant. Bisous
à plus tard ! bizz
Oupssss ….cela est un stressant tout ça …
Sourires
Bises Zaza
je continue avec beaucoup d’intérêt la lecture de cette nouvelle passionnante
belle journée Zaza
Passionnant, vraiment et les personnages ont tous une bonne personnalité !
Je continuerai à suivre même si je m’arrête un peu pour les fêtes.
A demain.
C’est l’hiver !
A demain
Biz
Ohhhhhhhhhh, cela ne me dit rein qui vaille !
Bonne journée ZAZA, biz.
Quelle histoire ! Meg va-t-elle s’en sortir ? Chris
Bonjour Zaza !
Toujours aussi palpitant comme dit mon cardiologue !
Le poème gribouillé est épique !
Bonne journée !
Pierre
https://rotpier27.wordpress.com/
oh la la , ça chauffe dans le coin, inquietudes, suspens ! surtout qu’un regard est planté dans le dos de notre héros…quel style cette Zaza, un grand bravo chère amie ! bonne journée et à demain sans faute !! bisous
vivement la suite! trop drole le poème!!! gros bisous ma Zaza. cathy
Désolée Zaza ,pas le temps de lire ,j’ai mes petits-enfants ,bonne journée bisouss
Bonjour Zaza,
Brrr…..l’hiver est arrivé……..
Bonne fin de journée
amitiés
Wouah Zaza!
C’est tout à fait comme chez Hitchcock!
Vivement demain pour lire la suite.
Bises et bonne journée
Excellent le poème, j’ai bien ri!
Tes personnages sont truculents, Monsieur Laidron m’a bien fait rire aussi…
Vivement la suite pour savoir ce qui arrive aux héros, gros bisous ma Zaza
Cendrine
Oh! ça devient dangereux … je tremble pour eux deux, surtout qu’il n’a pas l’air très courageux le Jacky! Bisous
Bonjour Zaza excuse-moi c’est un peu long pour moi pour tout lire et çà me donne le tourni ! Bisous !
Et tu t’arrêtes là?!! Non d’une pipe, tu le fais exprès coquine. Bon, elle a reçu un coup sur ma casquette, c’est sûr, mais qui et pourquoi? Il faudra que je revienne voir ça, c’est pas possible. Tu as de truculents personnages, Zaza, on sent bien le vécu….. A bientôt, ma douce, et ne nous fais pas trop attendre. Bisous du soir
C’est bien ta suite
Oh la la bon sang , j’ai hâte de savoir qui se cache dans l’appartement et ce qui est arrivé à Meg . J’adore ton style et la dose d’humour que tu instilles aussi bien dans les personnages que les situations .
Bonne soirée
Bisous
Déjà ? Meg n’a même pas encore ouvert son agence ! Rattrapée par le passé ? J’ai bien aimé la descente dans le vieil ascenseur à grille !