La quintessence de la sapience du Jeudi 22 Mai 2025… !!!

Message de Lilou Soleil : « Vous connaissez des expressions anciennes ? Vous en connaissez des rigolotes, des savoureuses, des savantes fleurant bon notre France ? N’hésitez pas, joignez-vous à nous et publiez… »

Expression :

« Compte d’apothicaire »

Signification :

  • Une facture dont le montant est tellement complexe qu’elle est difficilement vérifiable.
  • Une facture exagérée.
  • Un calcul compliqué dont les résultats n’ont aucun intérêt.

 Origine et définition :

Ce n’est qu’au début du XIX ème siècle que le terme pharmacien a remplacé celui d’apothicaire et, bizarrement, c’est au moment où ce mot a commencé à tomber en désuétude que notre expression est apparue.
À partir du milieu du XIV ème siècle, le mot « apothicaire » désignait un commerçant qui vendait des produits médicamenteux, mais aussi des produits rares, des épices ou des ingrédients comme le sucre, par exemple (1).
L’apothicaire était un personnage qui préparait, vendait et administrait des médications. Il devait donc avoir des connaissances avancées aussi bien en médecine qu’en ingrédients susceptibles d’entrer dans la composition des drogues qu’il fabriquait ; c’est pourquoi le savoir de cet homme érudit impressionnait très souvent ses clients.
Profitant de l’admiration qu’il suscitait, il se permettait de vendre ses remèdes par petites quantités et très cher, n’hésitant pas à gruger plus ou moins les petites gens dont certains devenus méfiants, n’hésitaient pas à négocier « le compte de l’apothicaire » ou le calcul du prix à payer, avant de le régler.
(1) Preuve que l’apothicaire ne vendait pas que des remèdes, la locution du XVI ème siècle, maintenant disparue, « un apothicaire sans sucre » désignait une personne ne disposant même pas du minimum pour pouvoir exercer correctement sa profession.

Complément :

Cette profession avait mauvaise réputation, comme en témoignent plusieurs locutions.
L’apothicaire était associé à la
tromperie.
Hier de réputation sulfureuse et aujourd’hui de très bonne réputation, il s’agit bien sûr de l’apothicaire, autrement dit le pharmacien.
Nos premiers dictionnaires, à la fin du XVII ème siècle, signalent au reste abondamment ce métier qui représente « une partie de la Médecine » consistant « en la préparation des remèdes ». Et Furetière de préciser qu’« à Paris, les Apothicaires prennent aussi la qualité de Marchands, épiciers et droguistes ».
Le même Furetière se fait aussi le relais d’une information amusante, on se plaint en effet alors « qu’il y a trop d’apothicaires au Danemark, quoiqu’il n’y en ait que trois à Copenhague et quatre seulement en tout pour le reste du Royaume, encore faut-il qu’ils fassent quelque autre trafic pour vivre : ce qui montre qu’on pourrait bien se passer d’apothicaire ! »
On le constate donc que l’apothicaire n’a pas bonne presse.
Pierre Larousse a raison de signaler que « l’apothicaire faisant commerce de substances dont le vulgaire ignore complètement la nature et le prix, le mot apothicaire devint, pour le peuple, synonyme de trompeur ».
Disons-le franchement, les factures des apothicaires étaient très complexes, on n’y comprenait rien… et ces factures qu’on appelait aussi « parties d’apothicaire » (1)  devaient se discuter, il fallait, dit le lexicographe, « en retrancher la moitié pour les payer raisonnablement ».

(1) ARGAN, assis, une table devant lui, comptant des jetons, en rapport aux « parties de son apothicaire ».
Le Malade Imaginaire – Molière, acte I, scène 1

Exemples :

Les étrangers se plaignent amèrement du manque de probité qui les rend dupes de tous les marchés qu’ils font. Les marchands surfont indignement, et même, après marché fait, rabattent encore. L’on rabat cinquante pour cent sur un compte d’apothicaire, c’est une chose reçue ; mais les Anglais prennent tous les comptes pour des comptes d’apothicaires, vont trop loin et se font appeler ladri, par ceux mêmes qui sont fort aises d’avoir leur pratique.
Louis Simond – Voyage en Italie et en Sicile

Cependant, l’apothicaire ayant présenté un compte de 800 livres sterling (19,200 fr.), le malade a trouvé cette somme exorbitante, et l’affaire a été portée devant les tribunaux. […] Les médecins et les juges n’ont pu s’empêcher de rire en écoutant les détails de ce singulier régime ; cependant justice a été faite et le compte d’apothicaire fut réduit à moitié.
Adolphe BiquetHistoire des fous célèbres, extravagants, originaux…

Elle en avait fini avec les comptes d’apothicaire et les lignes de dépenses serrées les unes derrière les autres, sans rien de l’autre côté pour garantir l’équilibre.
Delphine de ViganRien ne s’oppose à la nuit

Auteur/autrice : ZAZA-RAMBETTE

Une bête à corne née un 13 AVRIL 1952 Maman et Mère-Grand...! Vous trouverez ici : humour de bon matin, sagas historiques sur ma Bretagne, des contes et légendes, des nouvelles et poèmes, de très belles photographies de paysages et d’animaux, de la musique (une petite préférence pour la musique celte), des articles culturels, et de temps en temps quelques coups de gueules...! Tous droits réservés ©

23 réflexions sur « La quintessence de la sapience du Jeudi 22 Mai 2025… !!! »

  1. Cette expression est employée également quand il y a un litige entre amis. On remet les choses à plat (tiens voilà une autre expression à analyser !) lorsqu’on n’est pas d’accord sur un sujet qui peut n’avoir aucun rapport avec l’argent ! Bravo pour le développement de l’expression que tu as choisie. Bisous.

  2. Bonjour Zaza !
    Expression un peu désuète mais qui me plaisait bien ! Il y en a des comme cela ! 😉😃😜
    Bon jeudi ! 👍
    Pierre

  3. j’avais une connaissance comptable qui calculait tout au centime près, au gramme près, elle était parfois épuisante.
    on la surnommait l’apothicaire.

  4. Bonjour Zaza , il y a longtemps que j’avais entendu cette expression, merci pour les explications . Bisous bonne journée MTH

  5. Merci pour les explications!
    Une expression que je connaissais, apothicaire dans la famille et un patron qui l’employait beaucoup
    Bonne journée

  6. Bien connue cette expression et bien expliquée et illustrée.
    Cela complète bien les connaissance que j’avais…
    Bisous du jeudi ma Zaza

  7. Je ne savais pas que l’apothicaire avait si mauvaise presse.
    Merci pour toutes les explications
    Bonne journée
    Bises

  8. Bonjour Zaza,

    Quel travail de recherche !
    Ta page sur l’expression  » compte d’apothicaire  » est vraiment remarquable. J’ai trouvé très intéressant de voir comment l’expression est employée dans différents contextes littéraires. C’est très bien documenté et passionnant à lire.
    Merci pour cette belle explication.

    Bien amicalement, Marie Sylvie

  9. De suite en lisant l’expression, j’ai pensé au sketch de Muriel Robin « l’addition »…va donc savoir pourquoi!
    bises du jour
    Mireille du sablon

  10. Bonjour Zaza
    Je connaissais cette expression et l’emploie à l’occasion.
    Ton texte est plein d’humour!
    Bises.
    Bonne soirée,
    Mo

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.