Le coffre-fort musical … !!! 2/4

Chapitre II

Dix minutes après la conversation téléphonique entre Nestor et son ami, Benoît Tement, le journaliste arrivait, ayant brûlé quelques feux rouges entre les bureaux du journal et la demeure de Nestor Boyaux.

– « Entre mon vieux, tu tombes à point. »
– « Comment ça ?
– « J’ai des renseignements à te donner sur le crime dont nous parlions au téléphone, qui vont faire renaître ton enthousiasme pour cette affaire qui ne semble pas t’emballer. »  
– « Dis toujours, que sais-tu ? »  
– « Ceci… »  
Et Nestor, d’une voix brève, explique à Benoît Tement, en trois phrases, les déboires du type assassiné, du nom d’Abdul Lepez.  
Son arrivée au bar.  
Son ivresse prononcée.  
Son intérêt pour Nestor.  
La phrase de la jeune femme blonde.

La boîte à musique.  
Le trouble d’Abdul Lepez en apercevant la blonde et son ami aux yeux cruels.  
Le départ de l’horloger.  
Le départ du couple.  
Son départ à lui, Nestor. Et finalement, le fait qu’il ait trébuché dans le cadavre au coin d’une clôture.  
– « Et maintenant, Benoît Tement, dis-moi ce que tu penses de cette affaire.  
Coïncidence peut-être, mais j’aimerais bien entendre ton opinion. »  
Benoît se lissa les cheveux du plat de la main.  
– « Coïncidence, hum ! Je ne pense pas, moi… » 
Il tira un paquet de cigarettes de sa poche.

– « Mon avis, mon cher Nestor, c’est ce que les Anglais appelleraient un beau « set-up ». En d’autres termes, ça m’a tout l’air du commencement d’une affaire intéressante. Comme tu le dis, il y a cette boîte à musique à prendre en compte, puis ensuite la blonde et son ami, et finalement le fait qu’Abdul Lepez semblait connaître ce couple, et qu’il se trouva tout à coup fort embêté de les voir là… »  
– « Ce sont effectivement les conclusions de toutes mes observations… »  
– « Quoi faire, alors ? »  
– « Je ne sais franchement pas, Benoît. Y-a-t-il quelque chose que tu oublierais, un détail au sujet de notre horloger. Cela m’aiderait à me mettre sur la piste !  
– « Non… je ne… Attends donc une minute…Voici la rumeur que j’ai entendu. Abdul Lepez était horloger ? Sans être riche, il était plus à l’aise que la plupart des gens de son métier. J’ai entendu dire qu’il travaillait beaucoup pour les gens de la pègre. Il ne leur posait surtout pas de questions sur les raisons et les conséquences du travail qu’on lui apportait. »  
– « Mais c’est génial et vital, une information pareille ! Pourquoi ne me l’as-tu pas communiquée avant ? »  
– « Une information qui m’est totalement sortie de la tête ! »
– « Ah la belle affaire ! Oublier un indice aussi important ! C’est bien toi cela… »  
– « Ben voilà, c’est fait maintenant, tu as ton renseignement… »  
– « Oui, et si tu penses que je ne vais pas m’en servir !… »  
– « Et, moi, qu’est-ce que je fais là-dedans ? »  
– « Toi, Benoît, tu retournes au journal, et tu attends les événements. »

– « Où vas-tu ? »  
– « Je m’en vais faire un petit tour, histoire de voir ce qui se passe en ville, dans les quartiers malfamés … »  
– « Alors, j’attends ton coup de fil ? »  
– « Oui. »  
– « Entendu… Bonsoir… »  
Quand Benoît Tement fut parti, Nestor ouvrit, derrière son pupitre, la porte secrète donnant sur un petit cabinet privé. Il se grima pour changer d’aspect. Il souhaitait se fondre dans population rennaise de touristes, de la façon la plus anonyme possible.  
Ainsi, ce soir, Nestor Boyaux devenait peu à peu, à l’aide d’un nécessaire complet de maquillage, un nouvel homme, ne ressemblant plus à un gentlemen farmer, d’une bonne soixantaine d’années.  
Quand il sortit, Nestor était méconnaissable.  
Le visage rondouillard et habillé d’un collier de barbe et d’une petite moustache, il portait de grosses lunettes, portait aussi une moumoute laissant apparaitre quelques cheveux blancs, dégageant son front, en lui donnant facilement vingt ans de moins.

Un peu ventru, il était devenu un homme d’un âge moyen, l’un de ces touristes parcourant la ville.  
La chemise à carreaux, je chapeau type « ranch » vissé sur la tête, la barbe blanche, les besicles accentuaient encore plus cette apparence.  
Nestor devenu un être obscur, pouvant être vu partout en période estivale, car il était sûr de ne pas être remarqué plus que cela ! Il regarda l’heure.  
Minuit ! La meilleure heure pour trouver les criminels.
L’âme noire, le cœur cruel, recherchent le noir de la nuit.  
Nestor se regarda dans la glace et s’adressa à son reflet :  
– « Mon cher Rémi Caraime, » dit-il, « pars en chasse… le crime t’attend. »  
Il glissa un pistolet de fort calibre, mais dans sa ceinture, au lieu de sa poche, le coussin sur son ventre dissimulant l’arme. Puis, il tâta sa manche, presque à la hauteur de l’aisselle.  
L’autre pistolet était là. L’arme bien cachée, quasi secrète, qui serait sa dernière planche de salut advenant d’une attaque surprise. Il pouvait la sortir en un clin d’œil, tellement le mouvement avait été pratiqué souvent.  
Nestor était prêt.  
Il partit.  
La population du bar où Nestor entra était beaucoup plus bigarrée que celle se trouvant au Club 214 de la rue de Brest, au début de la soirée.  

Nestor Boyaux, sous sa nouvelle apparence de Rémi Caraime, entra sans être remarqué, et se commanda un whiskey.  
Le barman le regarda d’un air distrait, mais ne s’en occupa plus.  
Nestor put examiner les lieux à son aise. Il ne vit personne de remarquable, excepté deux jeunes perdus dans ce bouge, déjà bien éméchés !  
Trois hommes buvaient, appuyés contre le comptoir. Trois hommes qu’il classifia immédiatement comme étant des membres de la pègre. Leur visage endurci par le crime, leurs yeux scrutateurs, leurs gestes nerveux chaque fois que la porte s’ouvrait, leurs habits de mauvais goût, malgré la qualité, ne mentaient pas.  
Nestor les observa attentivement.  
L’un d’eux posa son verre sur la table, se mit à parler aux autres à voix basse.  
Nestor tendit l’oreille.  
Il ne comprenait rien.  
À ce moment, un homme entra. Nestor sursauta.  
C’était l’ami de la belle blonde, l’homme aux yeux cruels.

Il entra, se dirigea droit vers le comptoir. Nestor Boyaux avait assez confiance en son déguisement pour ne pas craindre d’être reconnu.  
Il resta coi, sans bouger.  
L’homme, arrivé au comptoir, salua les trois buveurs d’un bref signe de tête, et se joignit à la conversation à voix basse qui se poursuivait.  
Nestor vit que le barman était droit devant lui.  
Il l’interpella.  
– « Dites-donc, savez-vous qu’il s’est commis un crime pas loin d’ici, ce soir ? »  
Le barman regarda Rémi Caraime, alias Nestor Boyaux d’un air surpris.  
– « Un crime ? »  
– « Oui, un homme a été tué. »  
– « Où ça ? »  
– « Près du Club 214, à deux rues. La police l’a trouvé non loin de l’établissement, au pied d’une clôture… »  
– « Qui est-il ? »  
– « Un horloger, du nom d’Abdul Lepez. »  
– « Ah, oui ? »  
Nestor sentit un regain d’intérêt à ses côtés. Il sentit plutôt qu’il ne vit que les hommes s’étaient retournés pour l’écouter. Le barman était très intéressé.  
– « Quelqu’un d’arrêté ? »  
– « Non. La police dit que c’est le vol qui est le mobile, mais moi je pense que c’est autre chose… »  
– « Comment, autre chose, comment le savez-vous ? »  
Le barman regardait ce terne personnage qui ne paraissait pas crédible quant aux allégations avancées. 
Nestor ravala sa salive et joua le tout pour le tout.  
– « Il y avait une blonde qui a suivi Lepez quand il est sorti, après qu’il m’eut montré une boîte à musique…Voyez-vous, j’étais dans le bar avec Abdul Lepez avant qu’il ne se fasse tuer… »  
Nestor boyaux n’attendit pas longtemps.  
Il sentit quelque chose de dur lui meurtrir les côtes.  
Une voix éraillée lui murmura à l’oreille :
– « En arrière toute et vite ! »  
Il ne se fit pas prier.  
Plus que jamais, notre Nestor ressemblait à un pauvre individu qui n’a jamais eu de chance dans la vie.  
Un instant plus tard, sous la menace du revolver pointé dans ses côtes, Nestor Boyaux/Rémi Caraime,  se trouvait dans une salle mal éclairée, en arrière de la taverne. Un homme était assis à une table. Nestor Boyaux ne le reconnut pas. S’il était de la pègre, il ne le connaissait pas.  
Les hommes ici ce soir, lui semblaient tous des inconnus, excepté l’ami de la blonde entré rejoindre les autres au bar.  
Nestor se tint debout, et attendit.  
L’homme assis demanda : 
– « Qu’est-ce qu’il y a ? »  
Un des lieutenants se pencha au-dessus de lui, et lui murmura quelque chose à voix basse.  
L’homme assis, un type dans la quarantaine, pas très soigné sur lui, mais avec un visage d’une incroyable dépravation, regarda longuement Nestor Boyaux/Rémi Caraime, avec un air étonné, comme s’il n’en croyait pas ses yeux.  
– « Je n’ai pas l’habitude de perdre mon temps en interrogatoires ridicules, mais tes déclarations de tout à l’heure ont besoin d’être éclaircies. Qu’est-ce que tu disais ? »  
Prenant son attitude d’humble persécuté, qui lui allait si bien avec la personnalité de Rémi Caraime, Nestor s’exécuta. Il répéta ce qu’il disait devant le barman.  
L’homme assis l’écouta en silence.  
– « C’est tout ce que tu sais ? »  
– « Oui. »  
– « Comment t’appelles-tu ? »  
– « Rémi Caraime. »  
– « Comment se fait-il que tu saches tout ça ? »  
– Je vous l’ai dit, c’est parce que je buvais un demi au Club 214, quand Abdul Lepez est entré. Il s’est mis à me parler.

Un peu plus tard, j’ai rencontré un ami, et il m’a raconté que la police avait découvert un cadavre, puis il m’a raconté tous les détails… »  
– « Comment ton ami était aussi bien renseigné ? »  
La main de l’homme vint s’appliquer sur le visage de Nestor, et ses doigts grattèrent. Un peu de cire et un peu de fard lui resta au bout des ongles. Alors il rugit !  
– « Il est déguisé ! »  
Nestor se retourna une seconde, vit que toutes ses issues étaient gardées.  
Il poussa un hurlement qui paralysa un instant tous les occupants de la salle. Pendant ce temps, il se débarrassa du coussin qui lui enflait le ventre, puis en même temps tira son revolver…  
Tout ceci s’était fait si vite qu’on ne put pas suivre toute la rapidité des gestes.  
En deux secondes, au lieu d’un gentleman farmer grassouillet, les bandits avaient devant eux, la silhouette svelte de Nestor et combien formidable dans sa gestuelle.  
Le patron, celui qui était assis, n’avait pas encore eu le temps de saisir son arme, qu’il vit la transformation s’opérer. Il cria…  
– « Attention, les enfants, c’est le célèbre Nestor Boyaux ! Et les revolvers commencèrent à pétarader leur chanson de mort. Ce fut une fusillade sans répit, un concerto de coups de feu qui emplirent l’étroite salle d’une fumée âcre.  
Quelqu’un éteignit la lumière. Nestor en profita.  
De son large veston il sortit une cape noire qui lui couvrit d’un coup sec les épaules…Ainsi vêtu, il faisait corps avec le noir de la salle.  
Tout le monde tirait, excepté lui…Il entendit un gémissement…  
Quelqu’un dit : 
– « Qui a crié ? »  
Mais la voix fut couverte par une nouvelle salve de coups de feu, tirés dans la direction approximative de notre Nestor.  
Mais il était déjà loin. Il avait marché jusqu’à la fenêtre, l’avait ouverte et enjambée.  
Le pavé était à deux pieds du socle de la fenêtre.  
Il courut vers la rue.  
Avant de rejoindre le trottoir menant au bistrot qu’il venait de quitter, il enleva sa cape, la mit dans sa poche, tira un mouchoir. Il essuya un peu le maquillage. Puis, sortit un miroir minuscule et éclairé par la petite lumière de son smartphone, il modifia légèrement son maquillage. Il ajusta ses cheveux en les redescendant sur son front, enleva ses besicles, changea sa chemise pour une autre plus passe-partout, et à l’aide de petits rubans dissimulés ici et là, rajusta la coupe de son habit.  
D’un coup de pouce, il s’agrandit un peu les yeux, puis s’élargit la bouche.  
Une fois de plus, il était méconnaissable. Il sortit sur le trottoir. Un vendeur de journaux harangait la foule pour vendre des extras.  
Il en acheta un.  
Puis il entra dans le bar d’où il venait de sortir si rapidement par la fenêtre, mais cette fois, c’était par la porte qu’il avait déjà franchi sous les traits de Rémi Caraime .   
Alors qu’il entrait, il croisa quatre hommes. Ses compagnons d’il y avait trois minutes, dans la salle de l’arrière. Ils ne le virent même pas. Mais où donc était le cinquième, celui qui était avec la blonde ? Blessé ? Mort peut-être.  
Nestor se posait la question, quand il vit arriver la blonde au pas de course.

Elle marcha vers l’arrière du bar, entra dans cette même salle où venait de se passer cette rixe.  
Nestor Boyaux, sous son nouveau déguisement, alla de nouveau s’appuyer à la barre du comptoir.  
Le barman ne le reconnut pas.  

A SUIVRE …

Auteur/autrice : ZAZA-RAMBETTE

Une bête à corne née un 13 AVRIL 1952 Maman et Mère-Grand...! Vous trouverez ici : humour de bon matin, sagas historiques sur ma Bretagne, des contes et légendes, des nouvelles et poèmes, de très belles photographies de paysages et d’animaux, de la musique (une petite préférence pour la musique celte), des articles culturels, et de temps en temps quelques coups de gueules...! Tous droits réservés ©

24 réflexions sur « Le coffre-fort musical … !!! 2/4 »

  1. waou le retour de Nestor….si j’avais su je me serais levée plus tôt, pour pouvoir tout lire, car prise par le temps, je n’ai pu lire que quelques ligne pur l’instant….passe un doux mardi

  2. Courageux Nestor qui n’hésite pas à se jeter dans la gueule du loup. Un véritable « Bayard » sans peur. Une deuxième partie qui tient en haleine. J’attends la suite avec impatience. Bises et bonne journée

  3. Bonjour Zaza,
    Merci pour cette suite qui en ses deux billets , passionne et demande vite une suite car notre Nestor vient déjà de nous étonner comme cette pègre ….
    Bonne fin de journée avec j’espère le soleil comme ici
    Amitiés

  4. Bonjour Zaza
    Nestor est un peu gonflé il se prend pour Zoro mais gare à lui. Et la blonde va-t-elle pleurer son ami ou le soigné
    Belle journée frisquette
    Bisous Miaou moi Quya je reste au chaud

  5. Bonjour Zaza, ça y est je suis accro, j’adore toujours autant , et les noms que tu donnes c’est à mourir de rire. Bravo, bravissimo Zaza Bisous bon après-midi MTH

  6. Me voila enfin, heureux de lire tes articles et de passer un très bon moment virtuel avec toi !
    (et pour dire plus avec un copier – coller) Toujours quelques problèmes avec mon débit internet et des caprice d’ordinateur, mais je suis encore là en forme, et actif dans mon jardin. Après la pluie c’est le soleil, j’oublie que je suis confiné en passant un peu de mon temps à photographier les fleurs de mon espace vert ! Courage nous allons tous nous en sortir de cette épidémie du covid 19 !
    Cordiales amitiés & à +

  7. Sacré Nestor, d’abord en Gentleman Farmer puis avec sa cape noire qui me fait penser à Zorro, où tout ça va t’il le mener une fois de plus ?… On le sera bientôt :)
    Bisous et douce journée

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