Autrefois, il y avait, au collège de Tréguier, de grands élèves dont quelques-uns avaient vingt-deux ans voir vingt-cinq ans.
C’étaient de jeunes paysans auxquels on n’avait fait leurs études sur le tard.
Bien qu’ils se destinassent à la prêtrise, ils se livraient souvent à des plaisanteries qui sentaient le rustre.
Un jour, débarqua au petit séminaire un garçonnet de chétive apparence et dont l’esprit n’était guère plus robuste que le corps.
Il était, comme on dit chez nous, « briz-zod », c’est-à-dire un peu bête en breton.
Ses parents avaient pensé qu’à cause de sa simplicité même, il ferait un bon prêtre et s’étaient saignés aux quatre veines pour l’entretenir au collège.
Le cher pauvret ne tarda pas à devenir le souffre-douleur de ses camarades.
Il n’était pas de méchant tour qu’on ne lui jouât. Il avait d’ailleurs une âme sans rancune et se prêtait bonassement à tout ce qu’on exigeait de lui.
En ce temps-là, (je ne sais si cela existe encore), les grands élèves avaient au collège des chambres qu’ils occupaient à deux ou trois. On les appelait pour cette raison des chambristes.
Notre « innocent » avait pour compagnons de chambrée Jean Coz, De Pédernek, Charles Glaouier et De Prat.
Un soir qu’Anton l’Hégaret – ainsi nommé le « briz-zod » – était resté prier à la chapelle, Charles Glaouier dit à Jean Coz :
– « Si tu veux, nous allons nous amuser, aux dépens de l’idiot. »
– « Comment cela ? »
– « Tu vas défaire tes draps. Puis, nous les poserons, l’un à la tête, l’autre au pied de mon lit, de manière à former une « chapelle blanche ». Je me coucherai, et, lorsque l’Hégaret entrera, tu lui annonceras, les larmes aux yeux, que je suis mort. Tu seras censé m’avoir veillé jusqu’à ce moment et tu l’inviteras à te remplacer. Tu sais comme il est docile. Il ne sera pas nécessaire de le supplier. Tu auras soin, en sortant, de laisser la porte entr’ouverte. Tu diras aux camarades de chambres voisines de se tenir avec toi dans le couloir. Je vous promets à tous une scène désopilante. Si jamais, après une pareille nuit, l’Hégaret consent à veiller un mort, je veux que le « crique » me croque. »
– « Bravo ! » S’écria Jean Coz, « il n’y a que toi pour avoir des imaginations aussi extraordinaires ! »
Les voilà de se mettre à l’œuvre.
En un clin d’œil, les draps sont mis en place, sur Charles Glaouier. Une serviette est disposée sur la table de nuit. L’assiette, où étudiants ont coutume de déposer leur savon, sert de plat pour l’eau bénite.
On allume à côté quelques bouts de chandelle.
Bref, tout l’appareil funèbre est au complet et, dans le lit, Charles Glaouier, rigide, les mains jointes, les yeux mi-clos, simule à merveille le cadavre.
Lorsque Anton l’Hégaret entra, il ne fut que peu surpris de voir Jean Coz à genoux au milieu de la chambre et récitant le De profundis.
– « Qu’est-ce qu’il y a donc ? » demanda-t-il.
– « Il y a que notre pauvre ami Charles a rendu son âme à Dieu », répondit Jean Coz d’un ton bas et lugubre.
– « Charles Glaouier ! Il était si bien portant tout à l’heure. »
– « La mort a de ces coups imprévus. Voici deux heures que je le veille. J’ai dû l’ensevelir, tout seul. Je suis brisé d’émotion et de fatigue. Vous êtes, comme moi, son frère de chambrée. Je vous serai reconnaissant de prendre ma place auprès de sa dépouille mortelle, jusqu’ à ce que je revienne vous relever, après avoir goûté quelque repos. »
– « Allez, allez-vous reposer », murmura « l’innocent ».
Et il s’agenouilla sur le carrelage de brique, à l’ endroit que Jean Coz venait de quitter.
Tirant de sa poche son livre d’heures, il se mit à débiter toutes les oraisons d’usage en pareille circonstance.
De temps en temps, il s’interrompait pour moucher une des chandelles, pour jeter un peu d’eau, soi-disant bénite, sur le corps, et aussi pour dévisager timidement le camarade que Dieu avait rappelé à lui.
Car c’était peut-être la première fois qu’Anton le simple se trouvait face à face avec un trépassé. Il était si préoccupé de remplir décemment la fonction de veilleur funèbre qu’il n’entendait pas les chuchotements qui se faisaient à quelques pas de lui, dans l’entrebâillement de la porte.
Toute la bande des camarades dont les cellules donnaient sur ce couloir était là, les yeux aux aguets; ils n’attendaient, pour se gaudir, que la burlesque scène promise pas Jean Coz au nom de Glaouier.
Ils attendirent longtemps. Les heures nocturnes sonnèrent, l’une après l’autre. Minuit retentit, quand son tour fut venu.
Une impatience mêlée de peur commençait à gagner chacun.
Un des écoliers dit à mi-voix :
– « Glaouier ne bouge pas. Si cependant il était mort pour de bon ! »
Ce fut le signal d’une débandade. Seuls, les plus résolus demeurèrent.
– « Entrons ! Il faut savoir ! » Prononça Jean Coz. « Peut-être Glaouier a-t-il imaginé de nous mystifier tous, et non plus seulement Anton l’Hégaret. » Il est de force à cela !
Ce fut une irruption dans la chambre.
Mais, dès les premiers pas, les « apprentis-prêtres » restèrent cloués sur place par l’épouvante.
Le visage de Glaouier était jaune comme cire. Ses yeux étaient convulsés et fixes. Le souffle de l’Ankou avait terni son regard. L’âme, pour s’échapper, avait écarté les lèvres. On ne voyait plus entre les dents blanches qu’un trou béant, un creux noir et sinistre.
– « Le malheureux ! S’écrièrent d’une commune voix les étudiants, il est mort, il est réellement mort ! »
– « Jean Coz ne vous l’avait donc pas dit ? » Interrogea tranquillement l’idiot.
Conclusion !
A appeler l’Ankou, il finit toujours par arriver… !!!
Cette leçon vaut bien… un cierge de Pâques ! Il est de ces blagues alors…. merci Zaza, bises
J’adore la morale et l’atmosphère qui nous étreint tout du long…
Superbe récit!
J’aime beaucoup le personnage de l’Ankou, j’ai déjà écrit à son sujet. Sa « présence » me fut contée par une grand-mère qui avait du sang breton. Il y a de la Bretagne dans mon sang avec des ancêtres qui étaient en « terre de féerie » et l’Ankou fait partie de ces êtres qui ont marqué mon enfance.
Je t’envoie de gros bisous ma Zaza, brr on gèle… un temps de veillée au coin de l’âtre…
Cendrine
Oh ! La ! La ! Ça alors, hein … il ne faut pas l’appeler … bonne journée Zaza ! Bises♥
ah ce dortoir me rappelle un passage au collège que je n’ai pas trop aimé….(lol)….douce journée à toi
Nous avons fait des conneries dans le dortoir chez les sœurs mais jamais eu cette idée saugrenue qui a viré au cauchemar !!!! je suis gelée ma douce la semaine dernière 28 ° et ce jour 7° chercher l’erreur hihihihi bon mardi ZAZA
pour une sale blague, c’est une sale blague ! bravo pour l’histoire, on s’y croirait ! merci chere Zaza bisous
Tu parles d’une blague oh !
ça alors
Merci pour ce moment de lecture
Big bisous du matin très très frais ☻
il ne faut pas provoquer l’Ankou ni le diable… ils arrivent bien assez vite !
Rho…..et ben ..il faut se mefier de L’Ankou…..
Merci zaza
C’est pour nous mettre dans l’ambiance halloween que tu nous offre cette histoire ..Rires !!
Bises
Bonjour Zaza !
Il ne faut pas plaisanter avec la mort elle est si vite arrivée
… encore plus maintenant avec les réseaux sociaux !
Bonne journée !
Pierre
https://rotpier27.wordpress.com/
Bonjour Zaza.
Quand même sympa cette histoire.
Avec un peu de retard, je fais un petit tour chez toi pour te souhaiter une bonne semaine.
J’espère que chez toi il n’y a pas de problèmes avec le mauvais temps.
Chez nous, il pleut toujours, mais rien de bien méchant.
Bonne journée.
Bisous de nous deux.
pourse gaudir on attendait la fin du récit et voilà que c’est tout le contraire … belle histoire avec de ces mots que j’affectionne
Beurk, quelle fin, même si tel est pris qui croyait prendre…
Et voilà qui est pris qui croyait prendre ! Il a appelé la mort elle l’a pris,
Une légende j’espère…
Belle journée bisous d’EvaJoe
Coucou Zaza oh vaut mieux en rire ça fait moins peur de disparaître et c’est si bien contée qu’on est littéralement plongé dans ce récit, merci à toi bisous des malouins « envahis » lolll un coup de « rhum » et ça repart !
Conté dsl
En effet, il est des sujets avec lesquels il ne vaut mieux pas plaisanter.
Bises et belle journée
BOUDIE Quelle belle leçon à ces bougres d’abrutis ha ha ha .
Merci ma Zaza pour ces belles légendes que tu racontes si bien .
Bon mardi et gros bisous marseillais sous le ciel gris derrière lequel on devine un brin de soleil qui n’arrive pas à percer , mais aussi la pluie qui hésite à nous gâcher la journée ha ha ha .
Renée (mamiekéké).
http://idata.over-blog.com/1/00/97/37/Emoticones-cuisine/nvfguucr.jpg
Waouah !! Un récit qui nous prend en suspens jusqu’au bout !! donc bien ficelé et comme j’aime ;)
Merci pour ce moment d’émotion qui se termine mal mais la morale est sauve et la leçon est bien donnée… Cela me rappelle l’histoire où il ne faut pas crier au loup !! ;)
Merci beaucoup pour ton passage sur mon blog, zaza… et pour ton gentil message.
J’espère que tu vas bien… Gros bisous et à bientôt.
Cath
j’ai bien aimé cette histoire!!! je ne m’attendais pas à cette fin. gros bisous ma Zaza. cathy
Merci Zaza pour ce conte où l’Ankou s’est invité puisque sollicité .
Bisous
..ben mince alors…voici que l’Ankou s’invite sans prévenir…
Bises du jour
Mireille du Sablon
On rit et on tremble en même temps, merci pour cette histoire Zaza qui tombe bien pour Halloween !
Bonjour Zaza, triste histoire et le dénouement est vraiment inattendu! Bisous MTH
Bien fait pour les rieurs, mais quelle pitié que ce décès subit (càd si rapide et inattendu) ! Chris
Bonsoir,
Voilà qui est prit voulait prendre,il ne faut pas tenter le diable.
Bonne soirée
bises
Sympa cette histoire je la met pour demain sur le défi contes,légendes,mythe bonne soirée à toi bisous
Oups… mais je me dis qu’ils l’avaient bien cherché.
Les méchants sont toujours punis. :)