« Les métiers » – Poésie du mardi … !!!

Choix du thème par Lady Marianne

CE QUE DIT LE PAIN

À Léon Ottin.

J’entends les plaisants répéter :
Que dit le pain quand on le coupe ?
Bien aisé serait d’écouter.
Rien d’éloquent comme la soupe.
Fleur de froment ou sarrasin
À notre estomac qu’il convie,
Savez-vous ce que dit le pain ?
Savez-vous ce que dit le pain ?
Il dit : « Mangez, je suis la vie ! »

Qui sait ce que coûte le blé,
Hors les bœufs reprenant haleine
Et l’homme au visage brûlé
Qui creuse un sillon dans la plaine ?
Au grand monde inutile et vain
Qui, sans travailler le savoure,
Savez-vous ce que dit le pain ?
Savez-vous ce que dit le pain ?
Il dit : « Gloire au bras qui laboure ! »

Le progrès veut nos dévouements,
But large impose tâche amère.
Hélas ! tous les enfantements
Font saigner les flancs de la mère.
Pour stimuler l’effort humain,
Pour retremper une âme veule,
Savez-vous ce que dit le pain ?
Savez-vous ce que dit le pain ?
Il dit : « J’ai passé sous la meule ! »

Travailleurs, quand verras-tu clair ?
Ta boulangère est dame Usure :
Mais pas plus que le jour et l’air
Le pain ne veut qu’on le mesure.
Au long vertige de la faim,
Quand la misère est condamnée,
Savez-vous ce que dit le pain ?
Savez-vous ce que dit le pain ?
Il dit : « Fais ta grande fournée ! »

Nous pompons nos gouttes de sang
Dans les sucs de la nourriture ;
Notre corps, toujours renaissant,
S’assimile ainsi la nature.
Quand il devient par cet hymen
Cerveau qui médite et chair rose,
Savez-vous ce que dit le pain ?
Savez-vous ce que dit le pain ?
Il dit : « C’est mon apothéose ! »


Eugène Pottier (1816 – 1887) – Écrit en 1867.

Né le 4 octobre 1816 à Paris, ce poète est un goguettier révolutionnaire français, auteur des paroles de L’Internationale.
Dessinateur sur étoffes, Eugène Pottier compose sa première chanson, Vive la Liberté, en 1830. En 1840, il publie Il est bien temps que chacun ait sa part. Il participe à la Révolution de 1848. Sous le Second Empire, il crée une maison d’impression sur étoffes et, en 1864, il est à l’origine de la création de la chambre syndicale des dessinateurs, qui adhère ensuite à la Première Internationale.
Membre de la garde nationale, il participe aux combats durant le siège de Paris de 1870, puis il prend une part active à la Commune de Paris, dont il est élu membre pour le 2e arrondissement. Il siège à la commission des Services publics. Il participe aux combats de la Semaine sanglante. En juin 1871, caché dans Paris, il compose son poème L’Internationale et se réfugie en Angleterre. Condamné à mort par contumace le 17 mai 1873, il s’exile aux États-Unis, d’où il organise la solidarité pour les communards déportés. C’est de là aussi qu’il adhère à la franc-maçonnerie1, puis au Parti ouvrier socialiste d’Amérique. Ruiné et à demi paralysé, il revient en France après l’amnistie de 1880.
En 1883, il présente une chanson au concours de la célèbre Lice chansonnière et remporte la médaille d’argent.
Il retrouve à cette occasion le chansonnier Gustave Nadaud qu’il a croisé en 1848 et à qui il avait alors fait une forte impression.
Grâce à ces retrouvailles une cinquantaine de chansons sont publiées pour la première fois en 1884 et sauvées de l’oubli par Nadaud qui admire beaucoup le talent poétique de Pottier tout en étant très loin de partager ses opinions politiques.
Eugène Pottier décède à  Paris  le 6 novembre 1887 à l’
âge de 71 ans, il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise.

Auteur/autrice : ZAZA-RAMBETTE

Une bête à corne née un 13 AVRIL 1952 Maman et Mère-Grand...! Vous trouverez ici : humour de bon matin, sagas historiques sur ma Bretagne, des contes et légendes, des nouvelles et poèmes, de très belles photographies de paysages et d’animaux, de la musique (une petite préférence pour la musique celte), des articles culturels, et de temps en temps quelques coups de gueules...! Tous droits réservés ©

21 réflexions sur « « Les métiers » – Poésie du mardi … !!! »

  1. Quelle vie pour cet homme! ses poésies sont tellement réalistes et sa chanson encore plus!
    Bises de Mireille du Sablon

  2. un homme qui glorifie le pain à sa façon – un excellente découverte-
    je ne connaissais pas- merci c’est super-
    du talent et un grand coeur pour l’homme avec un grand H-
    bon mardi- bisous-

  3. Merci pour ce choix une belle ode au pain et à ceux qui permettent qu’il soit sur notre table .
    Une vie pas de tout repos pour Eugène Pottier , il me semble me souvenir que Ferrat l’a chanté dans sa chanson la commune .
    Bises

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