La bourse, la serviette et le manteau – 3/5 … !!!

Dans la série des contes & légendes de basse-Bretagne

 Selaouit holl, mar hoc’h eus c’hoant,
Hag e cleofot eur gaozic koant.
Ha na eûs en-hi netra gaou
Mes, marteze, eur gir pe daou :
******
Ecoutez tous, si vous voulez,
Et vous entendrez un joli petit conte,
Dans lequel il n’y a pas de mensonge,
Si ce n’est peut-être un mot ou deux.

Cette fois, il n’a pas besoin de la permission du portier, pour entrer.

Il met son manteau sur ses épaules, et, devenu aussitôt invisible, il pénètre jusqu’à la chambre de la princesse.
Celle-ci était seule. Il lui met un pan de son manteau sur la tête et dit :
— « Par la vertu de mon manteau, je désire que nous soyons transportés tous les deux dans une île, au milieu de la mer, à cinq cents lieues d’ici. »
Et aussitôt ils partent, à travers l’air, plus vite que le vent, et sont déposés dans une île, au milieu de la mer.
La princesse, se voyant jouée, à son tour, feignit de se résigner à son sort et même de se plaire en la société de son ravisseur. Mais, c’était afin de pouvoir le trahir plus facilement…

Elle remarqua qu’il ne se séparait jamais de son manteau, et qu’il le plaçait toujours sous sa tête, quand il dormait.
Elle pensa que ce manteau devait être un manteau magique, comme la bourse et la serviette, et que c’était par sa vertu qu’ils avaient été transportés dans cette île.
Elle conçut le projet de le lui dérober aussi et de retourner chez son père, par la même voie qu’elle était venue.
Une nuit donc qu’il dormait profondément, elle enleva le manteau de dessous sa tête, se le mit sur les épaules, et dit :
 — « Par la vertu de mon manteau, je désire être transportée, sur-le-champ, au palais de mon père. »
Et aussitôt elle s’éleva en l’air, et fut bientôt rendue dans sa chambre, au palais de son père.
Quand le clerc s’éveilla et se vit seul et ne retrouva pas son manteau, sous sa tête :
— « Hélas ! » S’écria-t-il, « elle m’a encore joué !… Pour cette fois, je suis perdu !… »
Et il se mit à pleurer.

Il passa trois mois dans cette île, qui était inhabitée, n’ayant pour toute nourriture que quelques fruits sauvages et les coquillages qu’il recueillait sur le rivage.
Un jour, en parcourant son île, il trouva des pommiers, qui portaient des fruits rouges et verts, d’un aspect fort appétissant.
Il cueillit une pomme verte et la mangea.

Mais aussitôt, une longue cornes lui poussa sur le front.
 — « Que signifie ceci ? » se dit-il, en tâtant cette corne, « me voici un joli garçon, à présent ! »

Il était très contrarié. Cependant, comme il avait trouvé les pommes bonnes, il en cueillit une autre sur un autre arbre, une rouge cette fois-ci, et la mangea aussi. Sa corne disparut.
— « Voici qui est à merveille ! » se dit-il, tout joyeux, « et ces pommes pourront me servir, un jour. »
Et il en cueillit quatre de chacun des deux arbres, et les mit dans ses poches.
Puis, il retourna au rivage.
Il aperçut un bâtiment, qui passait, sous ses voiles.
Il monta sur un rocher élevé, attacha son mouchoir au bout d’un bâton et l’agita en l’air, pour faire signe au bâtiment d’approcher.
Son signal fut aperçu et compris.
Le bâtiment se dirigea sur l’île, et le capitaine prit notre homme à son bord, et le débarqua à Brest.

Il s’empressa de se rendre encore à Paris, et descendit au même hôtel que précédemment.

Le lendemain de son arrivée, qui était un dimanche, il fit placer une petite table près du porche de l’église où la princesse avait l’habitude d’aller à la messe, la couvrit d’une serviette blanche et posa dessus quatre des pommes qu’il avait rapportées de l’île, celles qui faisaient pousser des cornes.
C’étaient des pommes magnifiques, et telles qu’on n’en avait jamais vu d’aussi belles, à Paris.
Quand la princesse vint à passer, accompagnée de sa femme de chambre, elle les remarqua et les admira. Mais, elle ne reconnut pas le marchand. Elle entra sous le porche et dit à sa femme de chambre :
— « Allez m’acheter ces pommes; je n’en ai jamais vu de semblables. »

La femme de chambre alla au marchand et lui demanda :
— « Combien vos pommes, marchand ? »
— « Quatre cents écus. »
— « Combien dites-vous ? »
— « Quatre cents écus. »
— « Quatre cents écus pour quatre pommes ! Est-ce que vous vous moquez de moi ? »
— « Nullement, mais, je ne les donnerai pas à moins; c’est à prendre ou à laisser, comme vous voudrez. »
La femme de chambre revint vers sa maîtresse :
— « Eh bien ! » Lui demanda celle-ci, « avez-vous les pommes ? »
— « Non, il en demande beaucoup trop cher. »
— « Qu’en demande-t-il donc ? »
— « Quatre cents écus ! II faut qu’il soit fou. »
— « C’est déraisonnable, en effet, et ce n’est pas moi qui donnerai jamais quatre cents écus de quatre pommes. »
Et elles entrèrent dans l’église.

Durant toute la messe, la princesse ne fit que songer aux pommes.
En sortant, elle s’arrêta encore pour les admirer, puis elle s’éloigna un peu et dit à sa femme de chambre :
— « Allez m’acheter les quatre pommes, pour quatre cents écus. »
La femme de chambre revint et dit au marchand :
— « Donnez-moi les pommes, marchand, voici quatre cents écus. »
— « Excusez-moi, Madame, ce n’est plus quatre cents écus, mais bien huit cents, qu’il m’en faut, à présent. »
— « Comment, mais vous me les aviez laissées pour quatre cents, et c’est déjà bien cher, je pense. »
— « Il fallait les prendre, alors, car, à présent, vous ne les aurez pas pour moins de huit cents écus. »
La femme de chambre revint vers sa maîtresse et lui dit :
— « Voilà qu’il ne veut plus donner ses pommes, à présent, pour moins de huit cents écus ! »
— « Huit cents écus, pour quatre pommes ! Il se moque de nous, cet homme. »
— « Donnez-les-lui, ma maîtresse ! Qu’est cela pour vous ? N’avez-vous pas votre bourse enchantée, qui vous fournit de l’argent à discrétion ? »

— « Eh bien ! Voilà huit cents écus; portez-les-lui, vite, et revenez avec les pommes. »
Et la princesse tira huit cents écus de sa bourse et les remit à la femme de chambre. Celle-ci alla les porter à notre homme et lui dit :
— « Voici les huit cents écus, marchand, donnez-moi les pommes. »
— « Je suis bien fâché. Madame », répondit le marchand, « mais c’est mille écus qu’il me faut de mes pommes. »
— « Vous m’avez dit huit cents écus, tout à l’heure. »
— « Il fallait les prendre, quand je vous les laissais pour huit cents écus. A présent, j’en veux mille ! »
Cette fois, la femme de chambre prit sur elle de conclure le marché, sans plus consulter sa maîtresse, et elle donna les mille écus et emporta les pommes.
Pendant le dîner, au palais, les pommes étaient sur la table, et faisaient l’admiration de tout le monde.
Au dessert, le roi en prit une, en donna une autre à la reine, une autre à sa fille, et la quatrième il ne savait à qui la donner, quand la princesse la réclama pour sa femme de chambre.
On attaqua les pommes aussitôt et on les trouva délicieuses.
Mais, voici bien une autre affaire…

A Suivre …

Auteur/autrice : ZAZA-RAMBETTE

Une bête à corne née un 13 AVRIL 1952 Maman et Mère-Grand...! Vous trouverez ici : humour de bon matin, sagas historiques sur ma Bretagne, des contes et légendes, des nouvelles et poèmes, de très belles photographies de paysages et d’animaux, de la musique (une petite préférence pour la musique celte), des articles culturels, et de temps en temps quelques coups de gueules...! Tous droits réservés ©

25 réflexions sur « La bourse, la serviette et le manteau – 3/5 … !!! »

  1. J’étais sûre que cet idiot allait encore se faire avoir, au lieu de profiter de son invisibilité pour reprendre ces biens !
    Bises et belle journée

  2. Eh bien, il en met du temps notre jeune héros pour se montrer plus méfiant. Mais j’imagine que la perfide princesse va regretter sa malhonnêteté lorsqu’elle va se retrouver avec une corne sur le front. Vivement la suite. Bon après-midi Zaza

  3. Ce fut un réel plaisir de venir te rendre une petite visite et voir les articles que j’avais en retard… Comme d’habitude j’ai pu découvrir des articles intéressants . Me voila de retour mais un peu fatigué de mon séjour en Ecosse, je me repose et je vais à la plage pour trouver l’eau et nager un peu … Je te souhaite de passer une bonne journée . Cordiales amitiés & à +

  4. ..tu nous laisses encore sur notre faim..je vais voir s’il me reste..une pomme!
    Bisous du jour
    Mireille du Sablon

  5. Oh le nigaud..il aurait pu profiter de son invisibilité pour récupérer la bourse et la serviette… et maintenant la gourmandise et le péché de la pomme..la suite zaza..

  6. Ah, enfin l’arroseur arrosé ! en l’occurrence cette gente Demoiselle qui n’a rien de gentil…. Je ris de sa tête lorsqu’elle se regardera dans son miroir…
    Tant pis, je resterai sur ma faim jusqu’à la rentrée : snif !
    Bisous Zaza et merci

  7. Fascinant, je me suis régalée à cette lecture, les objets magiques, les personnages, tout est très réussi
    Gros bisous ma Zaza, je t’envoie de belles pensées d’amitié en surchauffe
    Cendrine

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