

Egalité !
Dans un grand jardin en cinq actes,
Conforme aux préceptes du goût,
Où les branches étaient exactes,
Où les fleurs se tenaient debout,
Quelques clématites sauvages
Poussaient, pauvres bourgeons pensifs,
Parmi les nobles esclavages
Des buis, des myrtes et des ifs.
Tout près, croissait, sur la terrasse
Pleine de dieux bien copiés,
Un rosier de si grande race
Qu’il avait du marbre à ses pieds.
La rose sur les clématites
Fixait ce regard un peu sec
Que Rachel jette à ces petites
Qui font le chœur du drame grec.
Ces fleurs, tremblantes et pendantes,
Dont Zéphyre tenait le fil,
Avaient des airs de confidentes
Autour de la reine d’avril.
La haie, où s’ouvraient leurs calices
Et d’où sortaient ces humbles fleurs,
Écoutait du bord des coulisses
Le rire des bouvreuils siffleurs.
Parmi les brises murmurantes
Elle n’osait lever le front ;
Cette mère de figurantes
Était un peu honteuse au fond.
Et je m’écriai : — Fleurs éparses
Près de la rose en ce beau lieu,
Non, vous n’êtes pas les comparses
Du grand théâtre du bon Dieu.
Tout est de Dieu l’œuvre visible.
La rose, en ce drame fécond,
Dit le premier vers, c’est possible,
Mais le bleuet dit le second.
Les esprits vrais, que l’aube arrose,
Ne donnent point dans ce travers
Que les campagnes sont en prose
Et que les jardins sont en vers.
Avril dans les ronces se vautre,
Le faux art que l’ennui couva
Lâche le critique Lenôtre
Sur le poète Jéhovah.
Mais cela ne fait pas grand-chose
À l’immense sérénité,
Au ciel, au calme grandiose
Du philosophe et de l’été.
Qu’importe ! croissez, fleurs vermeilles !
Soeurs, couvrez la terre aux flancs bruns,
L’hésitation des abeilles
Dit l’égalité des parfums.
Croissez, plantes, tiges sans nombre !
Du verbe vous êtes les mots.
Les immenses frissons de l’ombre
Ont besoin de tous vos rameaux.
Laissez, broussailles étoilées,
Bougonner le vieux goût boudeur ;
Croissez, et sentez-vous mêlées
À l’inexprimable grandeur !
Rien n’est haut et rien n’est infime.
Une goutte d’eau pèse un ciel ;
Et le mont Blanc n’a pas de cime
Sous le pouce de l’Éternel.
Toute fleur est un premier rôle ;
Un ver peut être une clarté ;
L’homme et l’astre ont le même pôle ;
L’infini, c’est l’égalité.
L’incommensurable harmonie,
Si tout n’avait pas sa beauté,
Serait insultée et punie
Dans tout être déshérité.
Dieu, dont les cieux sont les pilastres,
Dans son grand regard jamais las
Confond l’éternité des astres
Avec la saison des lilas.
Les prés, où chantent les cigales,
Et l’Ombre ont le même cadran.
Ô fleurs, vous êtes les égales
Du formidable Aldébaran.
L’intervalle n’est qu’apparence.
Ô bouton d’or tremblant d’émoi,
Dieu ne fait pas de différence
Entre le zodiaque et toi.
L’être insondable est sans frontière.
Il est juste, étant l’unité.
La création tout entière
Attendrit sa paternité.
Dieu, qui fit le souffle et la roche,
Oeil de feu qui voit nos combats,
Oreille d’ombre qui s’approche
De tous les murmures d’en bas,
Dieu, le père qui mit dans les fêtes
Dans les éthers, dans les sillons,
Qui fit pour l’azur les comètes
Et pour l’herbe les papillons,
Et qui veut qu’une âme accompagne
Les êtres de son flanc sortis,
Que l’éclair vole à la montagne
Et la mouche au myosotis,
Dieu, parmi les mondes en fuite,
Sourit, dans les gouffres du jour,
Quand une fleur toute petite
Lui conte son premier amour.
Victor Hugo (1802-1885)
(Les chansons des rues et des bois)
Poète, auteur, dramaturge, romancier, journaliste, historien, Victor Hugo est avant tout un homme de principes obsédé par la défense de la liberté et la passion de lutter contre l’injustice sociale. Sa phrase : «je suis une conscience» peut, en effet, résumer toute son œuvre et toute sa vie. Conscience des événements qui ont fait vibrer l’âme de son temps, de ses tourments, de ses espoirs, de ses conquêtes mais aussi de la beauté et de la laideur de la nature humaine. Son engagement aux valeurs universelles va faire de lui la voix des faibles et des exclus, revêtant un caractère particulier. Ni l’art pour l’art ni l’art pour la politique mais l’art pour le progrès et pour le bien de l’humanité. Car les Droits de l’Homme ne sont pas, pour lui, un mot vide de sens. Les Droits de l’Homme sont vivants et doivent être défendus en acte. Hugo, qui se disait « porte-parole de l’humanité», a mis sa plume au service « des opprimés de tous les pays et de tous les partis ».
Petite ou grande, simple ou élaborée, une fleur reste une fleur à regarder façon poétique, et quel poète ce Victor… merci, bises
Merci pour ce joli texte que j’avais oublié.
Belle et douce journée
Très bon choix, Victor est et restera mon poète de cœur ! bon mardi, gros bisous !
Un grand Victor !
Merci pour ce poème, Zaza.
Bisous et douce journée.
J’aime beaucoup la délicatesse de la dernière strophe !
Un bel hommage ,bon mardi bisous
Dans la nature une petite fleur vient nous conter l’amour de la terre pour ses habitants
J’aime les écouter me conter fleurette
Bisous ma belle amie
Bonjour Zaza !
Très joli poème d’Hugo que je ne connaissais pas !
Merci ! 😉😉😉
Bonne journée !
Pierre
https://rotpier27.wordpress.com/
ce grand, mais son œuvre est si énorme que nous ne cessons de la découvrir… d’autant que sa pertinence est toujours actuelle
Excellent,Hugo.
On reste en admiration devant la nature de Victor Hugo!
Bises
Coucou Zaza un superbe poème , quel plume ce Victor Hugo. Bisous MTH
merveilleux poete, que Victor Hugo, merveilleuse fleur toute petite, merci Zaza bonne soiree bises
Un beau poème Zaza pour un bel hommage.je te souhaite un très bon Mardi bises
un trés joli texte
Monsieur Hugo aimait les jardins
comme celui de guernesey
bonne fin de journée zaza
bises
Un poème de Victor Hugo que je ne connaissais pas, joli!
Du Grand Victor !
J’aime…
Egalité chez toi.
Liberté chez moi.
Bisous ma Zaza
Toujours agreable de lire Victor Hugo merci pour ce moment Zaza belle soiree bises
Excellent choix, Zaza ! Bonne journée ! Bises♥
Quel beau portrait, quel poème magistral et délicat. A le relire, c’est certain encore et encore.
Bises